Quantcast
Channel: Economie – Midi Madagasikara
Viewing all articles
Browse latest Browse all 8408

Patrick Imam du FMI : Menace de crise en période électorale

$
0
0
Patrick Imam, représentant résident du FMI à Madagascar.

Le déblocage de la 3e tranche de la FEC (Facilité Elargie de Crédit) par le FMI (Fonds Monétaire Internationale), d’environ 45 millions USD est un signal fort pour les partenaires au développement de Madagascar, selon Patrick Imam, représentant résident du FMI. Cependant, le bon déroulement du Programme économique est exposé à un risque de crise. Interview.

Midi Madagasikara (MM). En quoi consiste cette deuxième revue, pourquoi est-ce nécessaire ?

Patrick Imam (FMI). Cette seconde revue s’inscrit dans le cadre des évaluations semestrielles que le Fonds Monétaire International a prévu de faire afin d’apprécier la performance des autorités dans la mise en œuvre du programme de réformes économiques et structurelles que nous soutenons à travers l’accord FEC. L’évaluation qui porte sur les résultats obtenus à la fin du mois de Juin 2017 est nécessaire pour voir si les objectifs que les autorités et le Fonds se sont accordés d’atteindre pour la période l’ont été  ou non. S’ils l’ont été,  un déblocage de fonds va avoir lieu, si ce n’est pas le cas, il faudra voir et identifier les mesures correctrices d’un  commun accord.

  1. Qu’est-ce que cette décision du Conseil d’Administration du FMI implique pour Madagascar, vis à vis de l’extérieur ?

FMI. Il est difficile de parler au nom des autres partenaires de Madagascar ou bien encore des investisseurs qui sont intéressés par le pays, mais l’expérience a montré que l’évaluation faite par le FMI constitue un élément que ces différentes entités prennent en considération pour leurs programmes ou leurs projets respectifs. On peut dire que cela renforce la confiance dans le pays. D’autant plus que pour cette deuxième revue, le Conseil a eu recours à la procédure de prise de décision dite du défaut d’opposition. Une procédure utilisée lorsqu’il convient qu’une proposition peut être examinée sans réunion formelle des membres du Conseil. Elle est utilisée quand la mise en œuvre du programme est sur la bonne voie et quand il y a une forte appropriation du programme de réforme qui fait que le Conseil a une forte confiance par rapport au programme. Ce qui constitue un bon point pour le pays vis-à-vis de ces partenaires et des autres intéressés de venir.

  1. Quels sont les défis qui restent à relever? L’achèvement du programme est-il probable ?

FMI. Il reste encore nombreux mais le plus important, et qui doit constituer une priorité pour les autorités, c’est la continuation de la stabilité politique. Réussir les prochaines élections constitue une étape importante dans ce sens. Un autre défi de taille, c’est la consolidation des acquis et des réformes entreprises jusqu’ici en matière de collecte de revenus et d’une meilleure gestion des dépenses publiques. La poursuite des réformes prévues pour assainir et redresser la situation des entreprises publiques est tout aussi importante pour que ces dernières cessent d’être des fardeaux pour le budget. Il en est de même pour l’amélioration du climat des affaires et la lutte contre la corruption, sans quoi l’augmentation massive attendue des investissements ne se matérialisera pas comme prévu avec pour conséquence un taux de croissance économique insuffisant pour permettre d’accroitre le niveau de vie de la population.

Malgré ces différents défis, l’achèvement du programme de réformes reste très possible. Il suffit que l’engagement pour mener à bien le programme reste constant. Jusqu’ici, les efforts consentis, notamment par l’équipe économique sous la houlette du ministre des Finances ainsi que du Gouverneur de la Banque Centrale, ont permis d’avoir un programme performant avec des résultats positifs malgré les divers défis rencontrés. Si l’engagement et la volonté de tout un chacun sont toujours là, et si le contexte de stabilité nécessaire pour se faire est mise en place par les autorités, il n’y aura pas de raisons pour que le programme économique ne soit pas mené à terme.

  1. Quels sont les risques auxquelles le pays s’expose si la loi contre le blanchiment d’argent ne passe pas ?

FMI. Ces risques sont nombreux. Dans l’ensemble, ils impacteront l’image que donnera le pays par rapport à son engagement de vouloir lutter vraiment contre la réduction de la corruption, puisque la lutte contre le blanchiment d’argent est une lutte qui va de pair avec celle contre la corruption. Il y a également les risques économiques qui y sont associés, notamment le retrait des correspondants des banques locales qui est de plus en plus fréquent dans des pays en Afrique n’ayant pas adopté ces lois, et qui a déjà commencé d’impacter certaines banques de la place. A Madagascar, le cas s’était déjà produit, contraignant les banques touchées à trouver d’autres correspondants mais avec des coûts élevés. Selon les études effectuées récemment par le Conseil de Stabilité Financière et la Société Financière Internationale, ces retraits touchent de plus en plus de banques, un peu partout dans le monde, et plus particulièrement celles qui n’arrivent pas à remplir les exigences de plus en plus importantes  des grandes banques internationales, qui font office de correspondants pour les opérations de paiement extérieures. Ces exigences ont trait surtout au cadre de lutte contre le blanchiment d’argent dans les pays où sont implantées les banques locales.

  1. Selon votre analyse, à quel niveau de risque, ce programme économique est-il exposé avec la période électorale qui approche ?

FMI. Vu l’historique de Madagascar, le risque que la prochaine échéance électorale puisse générer une instabilité politique est là. Si tel s’avérait être le cas, Madagascar partirait pour un autre cycle de crise qui lui coûterait cher économiquement et surtout socialement comme tel a été le cas au cours des années précédentes. Ainsi, la mise en œuvre du programme économique serait compromise, de même que les résultats positifs obtenus jusqu’ici sur les plans économique, social et structurel. Vu le niveau encore élevé de la pauvreté à l’heure actuelle, et étant donné que le pays ne s’est pas encore totalement relevé ni de la récente crise de 2009 ni des crises politiques antérieures. D’ailleurs, le pays ne pourrait plus se permettre une autre crise politique suite à une élection contestée. Un an avant la tenue supposée de l’élection, on ressent déjà les tensions qui y sont associées. Malgré tout, on reste confiant par rapport à la manière dont les autorités vont gérer cette importante échéance car l’avenir du pays en dépend.

Recueillis par Antsa R.


Viewing all articles
Browse latest Browse all 8408

Trending Articles