Clik here to view.

Une incohérence entre la volonté de l’Etat de booster les investissements et les mesures d’incitation notamment fiscales est constatée par le secteur privé. Une politique volontariste de l’Etat s’impose ainsi en commençant par freiner les importations qui envahissent le marché local.
« Le climat des investissements à Madagascar est morose ». Le Président du FIVMPAMA (Fivondronan’ny Mpandraharaha Malagasy), Erick Rajaonary, l’a évoqué lors d’une entrevue avec la presse, en s’appuyant sur des chiffres macro-économiques. Le taux d’inflation a atteint 7,9% si la prévision était de 7,1% dans le cadre de la Loi des Finances 2015 tandis que le taux de croissance se chiffre actuellement à 3,2% au lieu de 5% prévu initialement. En outre, la monnaie locale ne cesse de se déprécier par rapport aux devises de référence que sont le dollar et l’euro. A titre d’illustration, l’Euro s’achète en ce moment à 3 500 Ariary contre 3 100 Ariary au début de l’année. Et en 2016, la Loi des Finances Initiales prévoit un glissement de notre monnaie jusqu’à 3 898,8 Ariary pour 1 euro. Le taux de pression fiscale sera de 10,4 % au lieu de 9,9% cette année. « A mon avis, il n’y a pas de croissance économique dans le pays », a-t-il affirmé.
Propositions. En fait, « les Investissements Directs Etrangers ont fortement diminué par rapport aux années précédentes. Et il y a très peu d’investissements locaux en raison d’une perte de confiance des acteurs économiques. Personne ne veut plus investir », a expliqué Erick Rajaonary tout en réitérant qu’il n’y a pas de développement sans le développement du secteur privé qui est le leitmotiv de la croissance économique. Mais dans le cadre de la Loi des Finances Initiale 2016, le FIVMPAMA se plaint que ses propositions en vue de la relance économique n’aient pas été prises en compte par l’Etat. La preuve, la demande de réduction de la TVA à 10% pour les entreprises touristiques a été refusée. Il en est de même pour la déductibilité de cette taxe sur les carburants utilisés dans le cadre de l’exploitation normale de la société. La demande de suppression du droit d’accise de 10% sur les véhicules neufs ainsi que sur la téléphonie mobile a également été refusée alors que cette dernière constitue un outil de développement, d’après ses dires.
Incohérence. En outre, « l’Etat prévoit de supprimer l’exonération d’Impôt sur le Revenu pour les sociétés nouvellement créées à compter de 2016, alors qu’on veut formaliser les informels qui comptent actuellement 2 000 000 d’entreprises dans tout Madagascar. Ces informels contribuent à hauteur de 25% du PIB (Produit Intérieur Brut) », a fait savoir le Président du FIVMPAMA. Face à tout cela, les opérateurs membres de ce groupement ont constaté qu’il y a une incohérence entre la volonté de l’Etat de booster les investissements et les mesures d’incitation notamment fiscales. « Les autorités doivent donner l’exemple en mettant en œuvre une politique d’incitation à l’investissement. Il s’agit entre autres, d’une incitation des entreprises à se développer via des allègements fiscaux, de la facilité d’accès au crédit par la baisse du taux d’intérêt et l’allègement du fonds de garantie pour être accessible à tous. Il faut donner aux entreprises la possibilité d’investir tout en créant un climat de confiance », a exprimé Erick Rajaonary.
Importations. Par ailleurs, le Président du FIVMPAMA a soulevé qu’une politique volontariste s’impose afin de freiner les importations qui envahissent le marché local. « Nous ne sommes pas contre la compétitivité mais d’aucuns reconnaissent que cela détruit l’économie. On perd nos valeurs à cause de ces importations. A part cela, toutes les matières premières à Madagascar doivent être traitées sur place pour créer un maximum de profit. En effet, nous avons les possibilités et le savoir-faire pour les transformer. C’est malheureux de voir nos matières premières exportées de manière brute et réexportées ensuite sous forme de produits finis chez nous », a-t-il enchaîné. Il a également rajouté qu’un traitement égalitaire de toutes les entreprises est de mise quelles que soient leurs tailles et leurs origines.
Facteurs de blocage. A part cela, ce dirigeant du groupement des opérateurs économiques nationaux énumère d’autres facteurs de blocage à la croissance économique. Il s’agit notamment du problème d’énergie. « Le prix de l’électricité de la Jirama doit être identique dans tout Madagascar afin de donner les mêmes chances à tout le monde. En effet, le prix du KWh est de 0,10 USD dans la Capitale contre 0,22 USD à 0,27 USD dans les régions. Un plan de redressement de cette entreprise d’Etat s’impose tout en jouant la transparence car cela affecte beaucoup le secteur privé », dixit-il. Le manque d’infrastructure, surtout les routes, constitue également un autre facteur de blocage.
Mentalité. Mais ce n’est pas tout ! Erick Rajaonary a évoqué qu’il n’y a pas que l’Etat qui doit avoir un esprit volontariste mais les Malgaches doivent également changer leur mentalité. « Entre nous, on n’aime pas la réussite de nos compatriotes alors qu’on a des talents et des capacités pour assurer un développement. Ça me rend triste de ne pas trouver des Malgaches dans la liste des milliardaires du monde selon le classement Forbes. Les cinq personnes répertoriées à Madagascar ne sont que des étrangers. Cependant, les ressources humaines et les richesses naturelles exploitées proviennent de la Grande île. Je me demande bien si les Malgaches aiment vraiment leur patrie. Une chose dont on est sûr, la pauvreté dans le pays entraîne la destruction des valeurs. Et on risque de ne plus avoir de repère », a-t-il conclu.
Propos recueillis par Navalona R.