
Même le Service de Renseignements Financiers (SAMIFIN) se déclare avoir reçu des déclarations de suspicion de blanchiment d’argent dans cette filière juteuse, depuis ces dernières années.
La campagne de collecte de vanille va bientôt commencer dans la région de la SAVA. C’est une filière juteuse dans la Grande Île, puisque le prix d’un kilo de vanille préparée a atteint les 1 400 000 ariary lors de la campagne précédente. Mais des opportunistes s’y mettent également pour déréguler le marché de la vanille. Ce sont des pseudo-touristes étrangers qui pratiqueraient du blanchiment d’argent dans cette filière à Sambava, d’après les sources concordantes locales. Il s’agit notamment d’étrangers indo-pakistanais, français, chinois et pakistanais. En fait, ils viennent à Madagascar en obtenant le visa tourisme. Mais dans la pratique, ils deviennent des opérateurs-investisseurs par le biais de leurs concubines qui se chargent de toutes les paperasses administratives. Des planteurs ainsi que des sous-collecteurs de vanille les rejoignent ensuite dans leurs hôtels, où ils s’installent durant leur séjour pour pouvoir effectuer les transactions. Et à la fin de la campagne de collecte de vanille, ces pseudo-touristes disparaissent en quittant le pays. Ils échappent ainsi à tout contrôle fiscal. Soit un manque à gagner énorme en matière de recettes fiscales pour l’Etat, si aucune mesure n’est appliquée d’une manière effective, surtout à l’approche de l’ouverture de la prochaine campagne.
Plafond d’investissement. Dans la même foulée, l’EDBM (Economic Development Board of Madagascar), qui est une agence de promotion des investissements à Madagascar, devrait revoir le mode d’octroi d’un agrément à tout investisseur étranger désirant s’implanter dans le pays. Certes, cette entité se charge de fournir un service d’accompagnement dans les démarches d’implantation des nouveaux investisseurs, mais elle devrait quand même mettre un plafond d’investissement un peu plus haut pour bien discerner les vrais investisseurs des faux. Il en est de même pour le ministère de l’Intérieur qui délivre un visa pour des soi-disant investisseurs. En effet, ce sont les entreprises locales qui en souffrent beaucoup à cause de tous ces abus, a-t-on dénoncé. L’Etat devrait ainsi prendre des mesures drastiques pour mieux réorganiser la filière vanille. Des établissements hôteliers à Sambava ont déjà pris des responsabilités à leur niveau, en interdisant toute forme de commercialisation de vanille dans les chambres.
Grosse perte. Rappelons que le SAMIFIN (Service de Renseignements Financiers) a révélé à plusieurs reprises des cas de suspicion de blanchiment d’argent dans la filière vanille, depuis ces dernières années. Il y a, entre autres, des barons des trafics de bois de rose qui ont injecté leurs fonds dans l’exportation de girofle et de vanille, et ce, en se passant de la domiciliation bancaire. Des opérateurs étrangers importent des marchandises telles que des balles de friperies ou des produits de première nécessité. Puis, ils se lancent dans l’exportation de la vanille. Il n’y a pas ainsi de rapatriement de devises car ces opportunistes ne reviennent plus dans le pays, une fois que la campagne est terminée. Encore une fois, cela constitue de grosses pertes pour l’Etat en matière de recettes fiscales, et jusqu’ici, aucune suite n’a eu lieu au niveau de la justice, malgré les déclarations du SAMIFIN.
Vente à perte. Par ailleurs, il a été dénoncé par des acteurs locaux à Sambava que des collecteurs se sont enrichis d’une manière considérable avec ce mécanisme de blanchiment d’argent. D’ailleurs, plus de 90% d’entre eux sont informels, a-t-on appris. Le Service de Renseignements Financiers le confirme, en soulevant que des collecteurs achètent la production de la vanille à un prix supérieur au cours sur le marché international. C’est une situation anormale puisqu’un vrai opérateur rationnel ne pourra pas effectuer une vente à perte. Et en dépit de tout cela, ces collecteurs réalisent des fortunes colossales en investissant dans des constructions ou bien dans l’acquisition de nombreux Bajaj, d’après toujours les sources locales à Sambava. En plus, ils échappent au contrôle de l’administration fiscale. Les services déconcentrés chargés du contrôle fiscal sur place ont ainsi du pain sur la planche pour les formaliser, surtout que la campagne de collecte de vanille sera bientôt ouverte.
A part cela, des acteurs locaux réclament l’intervention de l’Etat en prenant des dispositions concernant la fixation de la date de la campagne et la maîtrise des prix de ce produit de rente. Une des priorités du gouvernement actuel est également la transformation des produits locaux avant de les exporter. Ce qui permet de créer une plus grande valeur ajoutée et d’emplois locaux. A titre d’illustration, les extraits de vanille sont plus rentables sur le marché international, a-t-on conclu.
Navalona R.